Psychose d' Alfred Hitchcock

Titre VO: Psycho

Titre VF: Psychose

Genre: Thriller/Epouvante-Horreur

Réalisation: Alfred Hitchcock

Scénario: Joseph Stephano, d'après le roman éponyme de Robert Bloch

Date de sortie aux Etats-Unis : 16/06/1960

Date de sortie en France : 02/11/1960

Producteur: Alfred Hitchcock

Distributeur: Paramount Pictures

Durée: 109 minutes

 

Distribution:

Anthony Perkins ... Norman Bates

Janet Leigh ... Marion Crane

Vera Miles ... Lila Crane

John Gavin ... Sam Loomis

Martin Balsam ... Milton Arbogast

 

Synopsis:

Secrétaire, Marion Crane est lasse de ne pouvoir mener la vie qu'elle désire. Son amant, Sam Loomis, un simple commerçant, ne peut l'épouser à cause de problèmes d'argent. Un beau jour, le patron de Marion la charge de déposer 40 000 dollars à la banque. La tentation est trop grande, et Marion s'enfuit avec l'argent. Elle quitte la ville en voiture pour rejoindre Sam.
Très vite la panique s'empare de la jeune femme. Lorsque s'abat une violente pluie d' orage, Marion décide de s'arrêter dans un motel pour y passer la nuit. Elle y fait la  connaissance du propriétaire, un sympathique jeune homme du nom de Norman Bates, qui vit avec sa mère dans la maison se dressant en surplomb du motel. Il lui attribue une chambre contiguë à son bureau.
Sous le charme de la jeune femme, Norman lui propose de partager son repas, pendant lequel il lui parle de sa mère, une femme "malade" au caratère possessif, et de sa passion pour la taxidermie. De retour dans sa chambre, Marion, qui a pris conscience que la fuite n'était pas une solution, décide de rendre l'argent à son patron. Elle se déshabille pour prendre une douche, pendant que Norman l'observe depuis son bureau par un trou pratiqué dans le mur.
Alors que Marion est sous la douche, une vieille femme, dont la silhoutte est à peine visible, surgit brusquement et la frappe mortellement à coups de couteau avant de disparaître...
Peu après Lila, la soeur de Marion, inquiète de ne pas avoir de ses nouvelles, rend visite à Sam. Ils font la connaissance de Milton Arbogast, un détective privé engagé pour retrouver les 40 000 dollars. Tous trois commencent alors une enquête qui va les conduire jusqu'au Bates Motel.

 

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"Psycho", le livre

 

Le scénario de "Psychose" est tiré du roman éponyme de Robert Bloch (1917-1994), écrivain connu dans le monde de l'horreur, auteur de romans policiers et de nouvelles fantastiques, qui entretint une importante correspondance avec H.P. Lovecraft à qui il vouait un véritable culte.

En 1957, Robert Bloch entend parler à la radio de Ed Gein, "le boucher de Plainfield", qui vient d'être arrêté pour le meurtre de deux jeunes femmes. Cette affaire a un énorme retentissement: on découvre en effet chez Ed Gein les têtes de ses victimes qu'il avait conservées, ainsi que de nombreux objets fabriqués à partir de peau humaine et de restes de cadavres le plus souvent déterrés dans les cimetières avoisinants. Il avait également préservé intacte, telle un sanctuaire, la chambre de sa mère, décédée douze ans plus tôt.

 

Bloch, qui n' habite pas près loin, se demande ce qui peut pousser un homme à commettre de tels actes. Il commence alors la rédaction de son livre "Psycho", qui sortira en 1959 aux Etats-Unis (1960 en France) et dont Alfred Hitchcock tirera le film du même nom, très fidèle au roman original.

Il rebaptise le meurtrier "Norman Bates", jeu de mots en anglais pour signifier que ce personnage n'est ni homme ni femme ("Nor" - "Man"), et qu'il est en lui-même un appât ("Bait").

 

Bloch essaie également d'analyser le comportement de Norman Bates par un incident survenu dans son enfance : Norman, qui aimait contempler son reflet nu dans les miroirs, est un jour surpris et sévèrement corrigé par sa mère. Depuis, ses efforts pour se dissocier de sa mère en s'intéressant à son propre reflet ont échoué, et sa relation avec elle a régressé à un stade primaire.

Le livre suscite la polémique dès sa sortie. On reproche à Bloch son sujet, un fait divers qui vient de traumatiser l' Amérique, et d' user de racolage (la scène de la douche, par exemple, est dans le livre beaucoup plus érotique). L'ouvrage intéresse néanmoins les studios hollywoodiens, mais finalement aucun d'entre eux n'ose prendre le risque de produire un film aussi violent et dont le "héros" est aussi peu sympathique.

Hitchcock reconnaitra a posteriori la qualité du roman, avouant volontiers que beaucoup d'éléments importants du film s'y trouvaient déjà. Selon l'autobiographie de Bloch, l'auteur conservait dans son portefeuille une note d'attention d'Hitchcock lui-même déclarant "Je n'ai rien changé à Psycho".

 

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 "Psycho", le film

 

"Psycho" est une oeuvre majeure dans la filmographie d' Alfred Hitchcock. Beaucoup considèrent le film comme un chef d'oeuvre du suspense, ayant totalement renouvelé le genre de l' épouvante au cinéma. Pourtant la genèse du film ne fut pas aisée et Hitchcock dut surmonter de nombreux obstacles afin de le produire.

 

- Genèse du film 

En 1959, Hitchcock est un réalisateur au sommet de sa gloire. Il vient de réaliser "La Mort aux trousses" qui est un énorme succès commercial. Alors qu'il aurait pu se contenter de suivre la même voie, le réalisateur aspire,  après plusieurs productions lourdes, à tourner un film moins contraignant, à la façon des épisodes de sa série télévisée "Alfred Hitchcock Presents". Cette expérience à la télévision lui a en effet permis de découvrir une manière différente de travailler, avec des budgets serrés et des temps de tournage réduits. Hitchcock sait également que depuis un certain temps, des petits films d'horreur de série B ont été de grands succès commerciaux et que l'économie du cinéma est en pleine mutation. L'idée est donc d' adapter cette méthode de production à un bon scénario, interprété par de bons acteurs, et mis en scène par un bon réalisateur. Résolu à innover encore et toujours, Hitchcock cherche  un sujet original pour son prochain film. 

C'est alors qu'il lit dans le New York Times une excellente critique du livre "Psycho" de Robert Bloch, qu'il s'empresse d'acheter. Dès la fin de sa lecture, il contacte sa secrétaire pour lui dire qu'ils tiennent leur prochain sujet. Hitchcock acquiert les droits du livre de façon anonyme pour la somme de 9 500 dollars. Il demande ensuite à ses assistants d' en acheter le plus de copies possibles afin d'éviter que les futurs spectateurs ne connaissent la fin pour ménager l'effet de surprise au moment de la projection.

La Paramount est totalement opposée au projet et tente de le dissuader. Le lecteur du studio qui avait pris connaissance du livre de Robert Bloch l'avait en effet jugé impossible à tourner en raison notamment de son caractère horrifique. Devant ce refus, Hitchcock se voit contraint d'assurer lui-même une partie du financement contre 60% du négatif.

Les jeux d'influence hollywoodiens ne permettant pas à Bloch d'adapter son propre roman, le scénario est finalement confié à un jeune auteur du nom de Joseph Stephano (qui deviendra quelques années plus tard producteur de la série "Au-delà du réel"). C'est Stephano qui a l'idée de modifier le personnage de Norman (un homme bedonnant et sans âge dans le livre), en un séduisant jeune homme, se conformant ainsi à la fameuse règle hitchcockienne "Plus réussi est le méchant, plus réussi sera le film". Il fait de même pour Marion Crane ('Mary' dans le roman), une jeune femme en fuite qui tombe par hasard sur le motel. En se concentrant sur le personnage de Marion, Stephano parvient à préserver l'essentiel de l'intrigue (à savoir: le sort de Mrs Bates).

Pour incarner le rôle de Marion Crane, qu'il envisage de faire mourir dès le premier tiers du film, Hitchcock tient absolument à engager une vedette hollywoodienne afin de déstabiliser les spectateurs. Plusieurs actrices sont envisagées et c'est finalement Janet Leigh qui est choisie. Anthony Perkins, dont l'ambiguïté est idéale pour le rôle, se voit confier la lourde tâche de donner vie au personnage de Norman Bates. Quant à Lila Crane, elle sera incarnée par Vera Miles, alors sous contrat avec le réalisateur.

 

- Tournage du film

Le tournage du film débute le 11 novembre 1959 pour s'achever le 1er février 1960. Prévu pour ne durer que 30 jours, le calendrier ne fut finalement dépassé que de douze jours.

A cause du budget serré (806 947 dollars), Hitchcock réalise son film dans des conditions de tournage proches de celles de sa série télévisée "Alfred Hitchcock Presents" et avec une partie de son équipe technique. Il décide également de tourner en noir et blanc. Plusieurs raisons expliquent ce choix: d'abord Hitchcock pensait que le film serait plus gore qu'angoissant si il était en couleurs. Le noir et blanc permettait également de contourner la censure puisqu'il atténuait l'effet produit par les scènes de meurtre. Enfin, d'après Anthony Perkins,"Hitchcock était un grand admirateur des 'Diaboliques'  [d' Henri-Georges Clouzot] , c'est pour cela qu'il a voulu tourner 'Psychose' en noir et blanc".

Le film est tourné aux Revue Studios, la branche télévision d'Universal où Hitchcock tournait aussi sa série. Les plans extérieurs sont filmés sur la route I-99 entre Fresno et Bakersfield, en Californie (projection arrière du trajet en voiture de Marion Crane) et une seconde équipe filme la scène d'ouverture à Phoenix en Arizona, ville dans laquelle Marion est supposée vivre.

'The House by the Railroad' d'Edward Hopper	Décor du Bates Motel et de la maison des Bates (Universal Studios, Hollywood, Californie).

La grande maison de Norman Bates fut le décor le plus coûteux de Psychose: 15.000 dollars. Cette architecture qu' Hitchcock appelait le "gothique américain" devait s'inspirer d'un mélange de "The House by the Railroad", du peintre Edward Hopper  et de la maison de la famille Adams dans le dessin animé de Charles Adams.

Dès le début, le réalisateur demande à son équipe de garder le secret absolu sur le film, leur faisant même prêter serment. Comme à son habitude, il planifie tout jusqu'au moindre détail, allant jusqu'à choisir la garde robe de son héroïne. Durant le tournage, Hitchcock se sert d'un fauteuil de réalisateur au nom de "Mrs.Bates". Il ne lui reste plus alors qu'à regarder son film "se faire" ...

 

 

~La scène de la douche

La séquence la plus célèbre de "Psychose" est sans doute la scène de la douche, l'une des plus étudiées de l'histoire du cinéma. D'une durée de seulement 45 secondes à l'écran, elle nécessita sept jours de tournage dans un studio de 15 m² , et 78 plans de coupe. Pour la réaliser, Hitchcock demanda à Saul Bass de dessiner un story-board extrêmement précis, qu'il suivit à la lettre à deux exceptions près: d'une part, il ajouta un plan montrant un coup de couteau ("impression d'un couteau qui frappe, comme pour déchirer l'écran et éventrer le film", avait-il indiqué sur le script) ; d'autre part, c'est lui qui eut l'idée de montrer l'eau teintée de sang aspirée par le siphon, alors que Saul Bass avait prévu de tourner la séquence sans violence et sans une goutte de sang.

Hitchcock concevait la scène comme un baptème, l'occasion pour Marion d'éliminer ce qui la tourmentait. Il voulait que le public ressente cette paix, de façon à ce que l'intrusion soit encore plus effrayante et tragique. Par l'utilisation d'un certain nombre d'angles, il désirait également que la caméra soit tout le temps les yeux du public, afin que la scène constitue une agression du spectateur, de l' écran sur lequel le film était projeté, du film lui-même. Le thème du voyeurisme est ici évident : le spectateur rentre dans l'intimité d'une séduisante femme nue sous sa douche, avant d'apercevoir l'effrayant couteau et le sang qui gicle.

Hitchcock tourne la scène plan par plan: Marion prenant sa douche, le rideau arraché, la lutte,  les cris de Marion , les lignes verticales du jet d'eau, les coups de couteaux, l'oeil mort de Marion ... puis juxtapose le tout au montage.

Janet Leigh dira plus tard: "La construction de cette scène est très ingénieuse. Car à partir de là, Hitchcock réussit à mettre en scène non plus ce que le spectateur voit réellement, mais ce qu'il croit voir. Il signe ce coup de maître grâce au montage et le public, pris dans l'action se laisse emporter. Chaque coupure est comme un coup de couteau. Le public se prend à croire, finalement, qu'il s'agit d'un coup de couteau, quand ce n'est qu'une coupure. Le mot coupure est d'ailleurs bien choisi, il correspond aux coups de couteau. "

Afin d'imiter le bruit du couteau pénétrant la chair de Marion Crane, les accessoiristes enregistrèrent le bruit d'un couteau planté dans un melon. Pour le sang, de nombreux essais furent faits avant le tournage, et c'est finalement du coulis de chocolat qui fut utilisé car sa viscosité était proche du sang réel (peu importait la couleur, puisque le film était tourné en noir et blanc).

La scène de la douche nécessita la participation de 4 comédiennes: Janet Leigh et sa doublure, ainsi que deux actrices pour jouer Mrs Bates: Margo Epper qui se glisse dans la salle de bain et arrache le rideau, puis Anne Dore, choisie par Hitchcock pour doubler Anthony Perkins, car il ne voulait pas que les traits physiques de Perkins ne trahissent son identité à ce moment du film. Revêtue du costume de Mrs. Bates, c'est Anne Dore que l'on voit porter les coups de couteau. Durant le tournage de cette fameuse scène, Anthony Perkins, lui, était en train de répéter une pièce de théâtre à New York.

 

~ Le meurtre d' Arbogast

La seconde scène marquante du film est le meurtre du détective Arbogast dans les escaliers par Mrs. Bates. En tant que seul autre moment violent du film, la scène devait être réalisée avec un maximum d'impact, sans toutefois dévoiler l'identité de l'agresseur. Pour se faire, Hitchcock filma en plongée maximum, ce qui lui permettait d'occulter les caractéristiques physiques du tueur. Afin d'incarner Mrs Bates dans cette scène, il fit appel à une comédienne du nom de Mitzi Koestner, qui avait la particularité d'être naine. Pour rendre la chute aussi réaliste que possible, il installa d'abord la caméra sur des rails de travelling et filma l'escalier en descendant. Martin Balsam, le comédien qui interprétait Arbogast, fut ensuite installé sur une chaise spéciale devant un écran de transparence sur lequel on projetait la descente de l'escalier. Il ne lui restait plus alors qu'à faire quelques gestes pour battre l'air avec ses bras pendant que les machinistes secouaient la chaise.

 

 - La Musique

"Psychose" marque la sixième collaboration d' Alfred Hitchcock avec son compositeur fétiche, Bernard Herrmann.

Pour le film, Herrmann choisit, selon ses propres termes, de composer une musique "en noir et blanc". Il reprend le thème de la "madhouse" qu'il avait déjà créé pour sa "Sinfonietta for Strings" (1935), réutilisé pour "Moby Dick" en 1938 (et qu'il réutilisa quelques années plus tard pour "Taxi Driver"). Il adapte la partition pour un ensemble à cordes: c'est la première fois dans l'histoire du cinéma qu' une musique de films était composée seulement d'instruments à cordes

Grâce aux sonorités stridentes des violons et des violoncelles sur un tempo rapide, Herrmann réussit à merveille à amplifier l'angoisse du spectateur et à rendre l' ambiance douloureuse et détraquée du Bates Motel, composant ainsi l'une des musiques les plus belles et les plus envoûtantes entendues dans un film d' Hitchcock.

Le rôle du compositeur se révèle capital pour la scène de la douche. Hitchcock voulait en effet que cette scène soit silencieuse, ne laissant que les hurlements de Janet Leigh se confondre avec le son du couteau pénétrant la chair. Mais, après un premier montage du film, le réalisateur s'en était montré si insatisfait qu'il avait songé à renoncer à sa sortie en salles.

Herrmann incite alors Hitchcock à prendre quelques jours de vacances, et compose durant son absence cette musique en n'utilisant que douze violons, dont l'effet se révèle terrifiant. Dès la première écoute, Hitchcock change d'avis, et suggère à Herrmann de répéter "ce merveilleux thème de la douche avec les violons" lorsque Lila Crane découvre la momie de la mère.

La musique que Bernard Herrmann composa pour "Psychose", est un modèle absolu du genre, qui restera la signature du compositeur et est entrée dans le patrimoine commun. A ce jour, elle constitue sûrement encore la pièce de musique de film la plus citée et la plus reproduite, référence de l'horreur au cinéma.

 

- Le Générique

Le générique du film est confié au graphiste Saul Bass, qui avait déjà collaboré avec Hitchcock sur "Vertigo" et "La Mort aux Trousses".

Pour un film reposant entièrement sur des twists et pour lequel il faut lire entre les lignes, Bass choisit l'abstraction la plus totale : rien ni personne n'apparait jamais à l'écran, hormis les noms de l'équipe. De minces barres grises ou noires traversent l'écran sans se croiser, de manière inégale, horizontalement et verticalement, contenant en substance tous les thèmes de "Psychose": l'identité fracturée, l'eau qui coule, les coups de couteaux ... Jusqu'à ce que les barres verticales, comme l'électrocardiogramme perturbé du spectateur finissent par se fondre avec la scène d' ouverture sur les immeubles de la ville de Phoenix.

 

- Le caméo d'Hitchcock

Comme dans tous ses films, Hitchcock fait une apparition clin d'oeil aux spectateurs. On le voit ici devant le bureau de Marion Crane, coiffé d'un chapeau de cowboy, vers la 7e minute du film (précisément à 6'18). Cette apparition lui permet de figurer dans la même scène que sa fille, Patricia Hitchcock qui interprète Caroline, la collègue de Janet Leigh.

 

- La censure

A l'époque de la sortie de "Psychose", dans les années 60, les films devaient être soumis au code Hays, un réglement lié à la censure. Un employé de la Paramount était ainsi spécialement chargé de cette tâche au sein du studio. Plusieurs scènes posèrent problème: celle de la douche bien sûr, où on dut soigneusement cacher toute image de nudité, mais aussi celles où l'on voit Janet Leigh en sous-vêtements et, de façon plus surprenante, une scène où sont filmées des toilettes, image jusqu'alors tabou au cinéma. "Psychose" est ainsi le premier film dans lequel on peut voir une actrice juste habillée d'un soutien-gorge et d'un slip. Le film montre également pour la première fois dans l'histoire du cinéma américain quelqu'un se servir d'une chasse d'eau.

 

- Campagne promotionnelle

Hitchcock prépara soigneusement la campagne de publicité entourant la sortie du film. Pensant que les retardataires ne comprendraient pas l'absence de Janet Leigh, la star mise en avant, il décida d'interdire l'entrée de la salle après le début de la projection, une idée volée à Clouzot qui l'avait déjà utilisée pour "Les Diaboliques".

C'est ainsi qu'on pouvait lire sur les affiches : "Le film que vous devez voir depuis le début...ou pas du tout !" ou encore "Personne, absolument personne ne sera admis après le début du programme Psychose, pas même le frère du directeur, le Président des Etats-Unis ou la Reine d'Angleterre (Dieu la bénisse) !".

Hitchcock tourna également une bande annonce dans laquelle on pouvait le voir présenter aux spectateurs la maison de Norman Bates. Au cours de la visite, il montrait les différents endroits de la maison où risquaient de se dérouler de macabres évènements (voir la vidéo).

 

- Accueil du film

Dès sa sortie en salles, le film fut un énorme succès. Tourné pour un peu plus de 800 000 dollars, il en remporta plus de 40 millions. "La Mort aux trousses" avait déjà contribué à faire d' Hitchcock un réalisateur très riche, "Psychose" le rendit richissime puisqu'il lui rapporta personnellement plus de 2,5 millions de dollars, en raison de son investissment financier initial.

Si le public fit un triomphe au film, les critiques furent beaucoup plus réticents. "Psychose" n'était soi-disant pas à la hauteur des autres films d' Hitchcock comme "La Mort aux trousses", "La Main au collet" ou "Sueurs froides" . Il est probable que les journalistes n' aient pas apprécié d' avoir découvert le film au cinéma en même temps que les spectateurs, puisqu' aucune projection de presse n'avait été organisée, ce qui expliquerait en partie cet accueil glacial. Ainsi, Charles Bennett, ancien scénariste d'Hitchcock dans les années 30, n'hésita pas à dire que "Psychose" était l'oeuvre d'un "sadique". Une journaliste anglaise ajouta qu'Hitchcock était un barbare. "Qui sait ?" lui répondit le réalisateur.

Le film reçut néanmoins plusieurs nominations, dont quatre aux Oscars (dans les catégories 'Meilleur photographie', 'Meilleurs décors', 'Meilleur réalisateur' et 'Meilleure actrice dans un second rôle' pour Janet Leigh) sans en remporter aucun. Le rôle de Marion Crane permit en revanche à Janet Leigh d'être récompensée du Golden Globe de la Meilleure actrice dans un second rôle.

"Psychose" est pourtant aujourd' hui classé par l'American Film Institute, à la 18e place parmi les cent meilleurs films américains de l'histoire du septième art, et à la première place des cent meilleurs thrillers.

 

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"Psycho" et l'invention du slasher

 

Lors de la sortie de "Psychose" en 1960, la critique du New York Daily News, Wanda Hale écrivit "L'épouvante va désormais changer de visage".

"Psychose" marque en effet un tournant fondamental dans le genre de l'horreur au cinéma jusqu'alors sous l'emprise des vieilles mythologies de la littérature gothique et des monstres fantastiques tels que Frankenstein, Dracula et autres Godzilla qui vont se retrouver brusquement frappés d'obsolescence. C'est en effet l'une des premières fois que l'on montre au cinéma un "monstre" aussi humain, un homme d'apparence normale doté d'affects et de désirs réprimés, mu par des pulsions meurtrières et avec un modus operandi.

Certes, avant Norman Bates, d'autres serial killers avaient déjà hanté les salles obscures, comme "M le Maudit" de Fritz Lang (1931) ou Le vengeur de "The Lodger" (en VF "Les cheveux d'or" ) déjà d'Hitchcok en 1927. Mais le réalisateur, en s'inspirant du tueur en série Ed Gein, dépoussière radicalement le genre et dresse un profil psychologique qui va profondément marquer le cinéma d'horreur.

Avec Norman Bates, le boogeyman ("croquemitaine") était né, et avec lui un genre, le slasher (=sous-genre du film d’horreur mettant en scène les meurtres d’un tueur psychopathe) . "Psychose" en dessine le style et les codes : mise en avant de l' auteur des crimes, par son histoire ou son mode opératoire; criminel plus marquant pour les spectateurs que ses victimes ou ceux qui doivent le combattre; fin ouverte et récit articulé autour de climax horrifiques (la scène de la douche, le meurtre dans les escaliers) distingués par leur propre montage et leur propre musique et qui sont censés provoquer l'effroi et marquer le reste du film de leur empreinte macabre.

Serial killer, climax, fin ouverte, scream queen : tout était là, en germe, pour inaugurer un renouveau du cinéma d'horreur.

Pourtant, à l'exception d'une tentative isolée de Francis Ford Coppola en 1963 ("Dementia 13"), il faudra attendre encore un peu pour que l'industrie du cinéma américain ne prenne la mesure de la révolution "Psychose", dont les premiers échos se firent d'abord sentir en Italie avec la vague des giallo. Ce n'est qu' en 1978 qu' un jeune réalisateur érudit, John Carpenter, décida de faire la synthèse de ces deux décennies d'évolution dans son film "Halloween, la nuit des masques" . Carpenter ne manqua d'ailleurs pas de rendre hommage au maître: il nomma l'un de ses personnages "Loomis" et, pour incarner l'héroïne, engagea Jamie Lee Curtis, la propre fille de Janet Leigh.

"Halloween" fut un énorme succès qui bouleversa le film d’horreur en établissant définitivement les codes du slasher, d'où allaient naitre des déclinaisons passionnantes, en même temps que d'innombrables films de série Z.

 

Sources internet : Allociné, hitchcockwiki, wikipedia

Bibliographie :  -  "Le Grand Atlas d' Hitchcock" (Editions Atlas)
                            -  "Dictionnaire Hitchcock" de Laurent Bourdon (Editions Larousse)
                            -  "Alfred Hitchcock au travail" de Bill Krohn (Les Cahiers du Cinéma)
                            -  "Hitchcock" de Patrick Brion (Editions de La Martinière)
                            -  "Hitchcock vu d'aujourd'hui" (Hors-série les Inrocks, 2013)

Un hommage appuyé au film "Psychose" est rendu dans la scène d'ouverture du second épisode de la première saison d'American Horror Story , "Home Invasion". Au cours d'un flashback, la scène relate un fait survenu en 1968 et qui montre le tueur en série R. Franklin assassiner deux élèves infirmières, Gladys et Maria.

Comme dans "Psychose", les scénaristes se sont inspirés pour leur personnage de serial killer d'un criminel ayant réellement existé: Richard Speck qui assassina 8 étudiantes infirmières de l'université de Chicago, le 14 juillet 1966. 

La séquence évoque deux accessoires marquant de la fameuse scène de la douche : la baignoire dans laquelle est noyée Gladys (scène non vue à l'écran mais devinée grâce aux gouttes d'eau tombant du plafond) et le couteau  avec lequel est poignardée Maria, décomposant ainsi le meurtre de Marion Crane en deux meurtres distincts.

Deux climax horrifiques marquent le flashback : le premier quand Gladys et Maria sont attaquées par surprise par le serial killer, et le second lorsque Maria croit se retrouver seule dans la pièce et est tout à coup poignardée à mort par R. Franklin dans le dos.

 

Comme il se doit, ces deux climax sont accompagnés d' une musique terrifiante : les stridences aigües des douze violons qu' Herrmann avait composé en 1960 pour son "thème de la douche" dans le film "Psychose" d'Alfred Hitchcock...